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Le blog de José
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28 septembre 2016

Après 9 années de pause, le retour !

Le temps a passé, l'envie d'écrire également.

Mais voilà, après une bonne trêve, l'idée de faire revivre ce petit blog me motive à nouveau !

En guise de premier article, voici le récit de la course du Grand Raid des Pyrénées. Il s'agit d'une course en montagne de 80km et de 55000m de dénivelé positif. Je goûte depuis 2013 aux joies du trail. Entre bobos et interruptions pour cause de vie familiale, me voici en 2016 de retour et plus motivé que jamais pour envoyer sur les sentiers.

Après avoir lu des dizaines de récits qui m'ont fait rêver, je me lance dans celui de mon expérience du GRP. J'ai d'abord eu envie d'écrire pour moi, pour poser des mots sur la magie de cette course, puis je me suis dit que cela pouvait aussi raviver quelques souvenirs chez ceux qui ont connu la magie du GRP. J'ai enfin pensé que cela pouvait donner envie à ceux qui ne l'ont pas fait de se lancer dans l'aventure. J'ai souhaité replacer cette course dans mon contexte actuel : la première partie présente donc ma reprise de la course à pied en 2016 après une longue interruption.

 

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Et voilà, nous y sommes ! Après une reprise tout en douceur au mois de mars et pas mal de kilos à perdre, je sens que j'arrive pour le Grand Raid des Pyrénées en forme, plutôt frais et plus motivé que jamais.

 

Petit retour sur la saison 2016 

Je reprends la course à pied après 10 mois de chantier pour retaper une maison. Au coeur de l’hivers, entre les enduits et la maçonnerie, je m’inscris sur un coup de tête aux 80km du Grand raid des Pyrénées. Au moins l’objectif est posé ! Le 15 mars, nous emménageons dans notre nouvelle chaumière et le 20 mars notre deuxième enfant naît. S'en suit alors un mois joyeux mais loin du sport !

 

Malgré tout, début avril, je sens l'envie de courir qui revient. Les 10 mois d'interruption quasi-complète ont été très longs, je trépigne à l’idée de chausser à nouveau les pompes et il va falloir s’y mettre si je veux courir le GRP ! Sauf qu'en voulant reprendre un peu trop vaillamment, des périostites mal soignées sont revenues immédiatement. Mi-avril, j’ai donc décidé de reprendre la course à pied « intelligemment ». La solution que j'ai trouvée consiste à faire des mini footing vallonnés à allure extrêmement lente plusieurs fois par semaine, afin de retrouver des sensations sous les pieds et dans les muscles.

 

Préchauffe pour le GRP : Guerlédan 58km

Après deux semaines de ce régime lent (3x7km par semaine), j’ai chargé un peu plus l’avant-dernière semaine précédant le trail de Guerlédan : une sortie vallonnée de 25 km le lundi puis une sortie de 40 km le jeudi. Car oui, je me suis inscrit aux 58 km de Guerlédan qui avaient lieu le 15 mai. Il n'y avait plus de place sur le 23km, donc je n'ai pas eu le choix ! C’était un peu tard dans le timing mais le corps a encaissé tout cela sans broncher. S’en est suivi ensuite une bonne semaine de récupération avec 2 petits footing plaisir avant la compétition.

 

Je pars tout en douceur à Guerlédan et au septième kilomètre ma poche à eau perce. Plutôt que de me lamenter sur mon sort, je considère cela avec optimisme : je vais être forcé de courir à la cool si je ne veux pas finir lyophilisé,  ce qui est une très bonne chose pour ce début de saison car j'aurais été incapable de me tenir si j'avais eu de l’eau. J’accélère tout-de-même un peu sur les 15 derniers kilomètres histoire de débourrer un peu les gambettes, c’est bon pour le moral ! Je termine 146ème, plutôt frais et ayant profité de la course. 3 jours de repos plus tard, je recommence à courir, histoire de voir si tout est au vert. C’est le cas ! 

 

Préparation GRP

Jusqu’à début juillet, je décide de courir plaisir à raison de 45 minutes à 1h, 2 à 3 fois par semaine, vallonné ou pas selon l’humeur. Quel plaisir de courir sans aucun autre objectif que celui d’aérer la truffe !

 

C’est bien beau tout ça mais si je souhaite aller au bout des 80km du GRP, il va être temps de s’y mettre sérieusement. Au cours des deux premières semaines de juillet, je cours 3 fois par semaine en réalisant une sortie d’1h30 à bon rythme, une sortie vélo de 2h-2h30 et une sortie plaisir (1h). Rien de bien violent ni de très cadré mais je sens que les jambes se renforcent, je perds un peu du poids accumulé au cours de la dernière année et je sens l’envie de courir croître.

 

15 juillet-5 août, vacances ! Nous partons à Madère puis aux Canaries en famille, je profite des siestes des enfants pour galoper dans les montagnes. Je cours tous les deux jours avec une alternance d’une sortie d’1h-1h30 technique et rapide (je me lâche en descente et je grimpe les côtes au taquet) et une sortie longue de 2h30 à 3h, à bon rythme mais sans trop forcer quand-même. Le 3 août, je pars de Las Palmas en direction du Pico de la Nieves, sommet de la Grande Canarie. Je redescend jusqu’à mi-parcours puis je rentre en bus après 6h de sortie. Les jambes sont en forme mais je commence à sentir une tendinite rotulienne. Il va falloir gérer en douceur jusqu’au GRP.

 

Je suis dubitatif sur mon entraînement sur ces îles : la chaleur a fortement limité ma vitesse de progression lors des sorties, j’ai beaucoup marché. Je ne sais pas si j’aurai assez de jus pour courir sur les sections roulantes du GRP. Je reste positif en me disant que j’aurai au moins appris à gérer la chaleur ! L’autre point faible : je n’ai réalisé aucun entraînement fractionné, de VMA. Mais comme c’est une course lente, ce n’est peut-être pas trop grave. Bref, les questions déboulent, ce qui se comprend puisque la distance de 80km/5000D+ m'est inconnue. (Mon plus long : les Templiers 70km/3400D+ en 2013).

 

Tendinite mon amour

Dimanche 7 août, retour à Nantes, 25°C, quelle fraîcheur ! Je pars pour un footing plat de 50 minutes à fond la caisse. Que du bonheur après trois semaines de sentiers escarpés dans un four. Sauf que la tendinite rotulienne se réveille vraiment. Et là je fais moins le malin : le mardi suivant, je tente une séance de côtes (10x2min) : impossible de pousser, j’abandonne au bout de 5 côtes, je ne peux plus descendre. Le moral est dans les chaussettes mais je décide de ne pas tout arrêter cependant. Je tente l’option « plusieurs petites sorties escargot » rapprochées : 1h à tout petit rythme histoire de ne pas trop solliciter mais histoire de ne pas raidir, puis glace et étirements. J

 

Je pars le vendredi pour une sortie de 1h vallonnée à tout petit rythme : même à pied, les descentes sont très douloureuses, je ressens comme un pic de douleur dans le genou à chaque flexion. Je glace, je n’y pense pas, je glace, j’oublie. Je repars le lendemain pour 40 minutes au même rythme. Et là, ça va mieux. Je tente alors l’impossible, partir le lendemain (14 août) pour ma dernière sortie longue : 4h. Je fais une pause après 1h30 de course car il fait super chaud. J’en profite pour masser doucement mon tendon, il semble tenir le coup. La fin de la sortie se passe plutôt bien.

 

17 août : je tente la dernière sortie côtes (10x1’30), je ne pousse pas trop mais la séance passe bien. Me voilà plutôt rassuré, j’ai l’impression que la baisse de charge de la semaine précédente a payé.

 

19 août : sortie plaisir d’une heure, tout cool, les jambes demandent à pousser mais ce n’est plus le moment ! La tendinite se fait oublier.

 

21 août : dernière sortie longue : 2h vallonnées, je me lâche un peu sur le milieu de parcours, j’ai envie d’accélérer, mais d’une part ce n’est absolument pas raisonnable et d’autre part la tendinite fait coucou au bout de 10 minutes. Je termine en souplesse, glace et étirements, la douleur s’estompe de nouveau.

 

23 août : petite sortie de 45 minutes, 100D+, 9,5km/h de moyenne. On a dit cool, c’est cool ! Je me fais doubler sur le sentier, je ronge mon frein !

 

Arrivée dans les Pyrénées : comme c'est beau !

24 août : j’ai rejoint mes parents et mon frère à Bagnères-de-Bigorre, je profite du coin pour ma dernière sortie de 25 minutes tout en douceur : je pars en direction du Bédat, un joli petit sommet qui domine la ville. En 25 minutes je n’ai fais que la première partie, mais la raideur de la pente réveille immédiatement ma tendinite. J’essaie de rester zen, d’oublier, je verrai bien le jour J. « Oui mais c’est quand-même inquiétant… » Chut ! On verra samedi.

 

25 août : j’embarque mes parents dans une chasse aux trésors sympathique : munis de jumelles, nous essayons de repérer les balises du parcours entre Tournaboup et le lac de Gréziolles, alternant balade à pied et en voiture. Le parcours est superbe mais ça va grimper sec ! L’itinéraire me paraît titanesque, la pression monte !

 

26 août : après une matinée à préparer et re-préparer mon sac, je file seul en direction de Vieille-Aure. Pour l’occasion, mes parents m’ont prêté leur camping-car. Quel luxe ! Je stationne à 300 mètres du départ, j’ai l’eau courante, le gaz, la musique, un lit 2 places… Royal. Après des pâtes au beurre / saucisson, je m’allonge vers 21h30 dans l’espoir de dormir quelques heures. La nuit sera plutôt moyenne, mais je parviens quand-même à grappiller quelques heures de sommeil et je me réveille vers 3h45, soit 15 minutes avant mon réveil. Brioche vendéenne, beurre, compote, jus d’orange. Rien d’hyper digeste mais j’ai faim et je n’ai jusqu’à présent jamais eu de problème de digestion en course. Je ne pars pas pour un 800m !

 

On y est !

4h30 : j’enfile mon petit sac, mes chaussures, mon tee-shirt, mon dossard, ma frontale. Pour l’occasion j’ai tenté de gratter du poids partout où c’était possible. Mini-frontale, chaussures de route de 240g, sac S-Lab Sense 3L, veste imperméable de 90g, tee-shirt et mini-short Décathlon de route. C’est la première fois que j’optimise le poids et je ne regrette pas : j’ai l’impression de partir tout nu ! Courir le GRP en chaussures de route est peut-être un peu risqué, mais les Sonic Pro (Salomon) ont un pare-pierre dur qui protège bien le gros orteil. Et puis je n’ai couru qu’avec ces chaussures depuis deux mois, sur des sentiers parfois très escarpés, alors je tente ! J’ai laissé une paire de NB Leadville à mes super assistants de course que sont mes parents et mon frère. En cas de douleurs, je pourrai les enfiler à un ravito. 

 

4h40 : je mets le nez dehors, l’air est frais, il fait bon, en route pour la ligne de départ ! Je me positionne à environ 5-10m de la ligne de départ, vers les 200èmes à la louche. Je me fais engueuler par un coureur qui n’apprécie pas trop de voir les premières rangées se garnir après son arrivée. Je ne sais pas trop qu’en penser, je me sens capable de tenir le rythme pour être 200ème, je me dis qu’il est préférable de se placer en fonction de son niveau. Bref je me fais tout petit et j’essaie d’oublier, ce serait dommage de partir tendu !

 

5h : Pan ! A l’attaque ! Je me lance dans le peloton, j’essaie de garder une distance de sécurité autour de moi car la nuit je vois très mal et je crains de m’emmêler les pieds dans ceux d’un autre coureur. Les deux premiers kilomètres sont plats et plutôt roulants ce qui permet de chauffer la machine. Je pars un peu fort mais sans me mettre dans le rouge, je me retrouve rapidement dans un petit groupe d’une dizaine, nous passons le 1er km en 4’30 et le deuxième en 5’10. Le peloton commence à s’étirer, voici le début des hostilités : la première grosse côte et de nuit ! Très vite je réalise que ma frontale manque de pêche et que la tendinite est bien présente. Mais enfin je ne vais pas abandonner après 2km, ce serait dommage ! J’attaque donc la côte sur un rythme assez soutenu mais pas non plus trop violent. 

 

Je remonte des coureurs petit à petit et hormis cette gêne au genou je me sens en pleine forme. Vers le 10ème kilomètre arrive le premier replat : j’en profite pour mettre un peu de vitesse. Ne voyant pas grand-chose, j’essaie d’augmenter la puissance de mon éclairage. Mais au moment de passer celui-ci en mode turbo patate je me perds dans les menus, si bien qu’elle s’éteint une demi-seconde, juste ce qu’il faut pour que je heurte une pierre. J’évite de justesse la chute mais je sens que je me suis vraiment contracté. Je repars dans mon petit groupe, un peu maussade, pestant contre ma lampe et mon genou. Vivement que le jour se lève, je ne suis décidément vraiment pas un coureur nocturne !

 

Arrivée à la cabane de Tortes, fin de la première grosse côte, et joli lever de soleil. Impeccable ! Le genou tient le coup, je peux enfin ranger cette frontale, en espérant ne pas avoir à la ressortir en fin de journée. Je me sens super bien et j’attaque la descente vers le ravito de Merlans à bonne allure (5’00 au km). La journée étant annoncée comme particulièrement chaude, je préfère mettre du rythme tant que la fraîcheur est de mise. Les cuisses sont à l’aise, je déroule avec plaisir et j’arrive à Merlans à 6h59. Je n’ai aucune idée de ma position, la course est longue, on verra plus tard. J’enfile un verre d’eau et je repars de suite.

 

La section suivante, en balcon au-dessus du lac de l’Oule est splendide. Je me retrouve dans un petit groupe de 5, nous filons bon train tout en papotant de temps à autre. Au bout de quelques minutes, le coureur qui me suit m’explique qu’il a déjà fait la course l’an passé et qu’il ne sert à rien de partir à fond car il y a souvent beaucoup de casse en fin du parcours. N’ayant jamais couru cette distance et ce dénivelé auparavant, je ne puis qu’être d’accord avec lui. Je lui demande à tout hasard combien il avait terminé : 9ème. Pardon ? J’ai dû mal comprendre. Sisi, 9ème. OK. Donc je suis au 20ème km en train de tailler le bout de gras avec le 9ème de cette même course l’année précédente. Mon objectif secret étant de finir moins de 200ème, la question se pose : suis-je complètement barge ou suis-je en sur-régime ? On dirait ni l'un l'autre, la tendinite reste discrète, le cardio indique 145bpm alors que nous avons pris d’assaut depuis quelques minutes la montée au col de Barèges.

 

Depuis le col, nous piquons vers le mini-ravitaillement d’Aygues Cluses ou l’on nous annonce être dans les 30 premiers ! Incroyable. Et toujours en pleine forme, je sens que j’en garde un peu sous le pied. Je bois 2 verres d’eau et 10 secondes plus tard me voilà reparti au taquet, remonté comme une pendulette !

 

La montée vers le col de Madamète est de toute beauté et fraîche grâce à l’altitude et à l’heure matinale. Si seulement je pouvais rester un peu au bord des petits lacs, les pieds dans l’eau ! On verra plus tard. En attendant, je repars en tête d’un groupe de 4 qui s’effiloche progressivement. Au col, j’attaque seul la descente, prudemment car la tendinite se réveille un peu. 5 minutes plus tard, je suis rattrapé par les 3 coureurs qui me passent devant à 200km/h. J’accélère alors un bon coup histoire de limiter la perte et curieusement, je ne résiste pas trop mal. 

 

Mon frère me rejoint pour le dernier kilomètre avant Tournaboup. Quel plaisir de le voir ! Nous passons ce dernier kilomètre en 4’50, je commence à sentir les jambes, mais quoi de plus normal après la descente qu’on vient de s’envoyer ! Au ravito, mes parents sont surpris de me voir si tôt ! La veille, je leur avait annoncé que j’estimais mon passage vers 11h-11h30 au plus tôt, mais il est 9h55 quand je pointe à Tournaboup ! Ma petite famille a soigneusement préparé mon ravitaillement : 1 minute plus tard, je repas avec 2 barres de céréales et 1L de boisson dans mes gourdes, soit l’équivalent de ce que j’ai consommé depuis le départ à 5h. Me voilà rechargé à neuf, en route pour le Pic du Midi !

 

Réchauffement apocalyptique

D’un seul coup, la course devient moins fun. J’ai chaud dans la côte, puis très chaud, puis trop chaud. J’avance comme une tortue, je prends un coup au moral lorsque je me fais doubler par deux gars super rapides tout de noir vêtus. Comment font-ils ? J’en double deux autres qui sont bien calcinés, j’ai mal pour l’un des deux quand je vois sa tête. Au fur et à mesure de l’ascension, la température diminue et je reprends du poil de la bête. J’arrive à reprendre quelques coureurs et je pointe au col du Sencours en 23ème position ! Je prends un petit temps au ravitaillement pour refroidir la machine, assis sur un chaise : 2 verres d’eau et un carré de fromage plus tard, soit 2 minutes 30 après mon entrée au ravitaillement je repars frais mentalement et physiquement, content de me lancer en direction du Pic !

 

Je suis assez rapidement déçu : j’espérais trottiner dans les lacets jusqu’au pied de l’ascension finale. Que nenni, ce sera marche jusqu’au bout. J’ai dû courir 300 m au total dans les portions les moins pentues, autant dire rien du tout. Ce qui me rassure c’est que personne ne me reprend dans la montée, personne sauf le 9ème de l’année passée, qui avait disparu de mon radar depuis le ravito de Tournaboup mais qui arrivera 30 secondes derrière moi au Pic. Je lève un peu le pied dans les 100 derniers mètres car je sens des débuts de crampes dans les mollets. Rien d’inquiétant, je n’ai jamais de crampes hormis en altitude. Dans 30 minutes je serai déjà pas mal redescendu, les crampes devraient disparaître, c’est du moins ce que je me dis en essayant de rester positif.

 

Le Pic !

Me voilà au Pic ! C’est beau ! Bon allez on se casse, on n’est pas là pour vendre des cartes postales. La descente au Sencours commence mal. L’ex 9ème me double en franchissant le mur du son, un autre coureur me dépasse rapidement. Arrivé au Sencours, je bois deux verres d’eau avant d’attaquer la longue et chaude descente. Looooonguuue et chaaaaauuude… Je subis vraiment, je cours comme un pingouin, je ne vois plus les gars qui m’ont doublé, je ne vois personne derrière, je suis seul, je surchauffe, je veux en finir avec cette portion sans vent. Juste avant la remontée à la Mongie, un coureur me dépasse, je suis incapable de le suivre. Je me rafraîchis autant que possible dans chaque sourcinette ou flaque d’eau. Quelques minutes avant l’arrivée à la Mongie, je vois deux types qui me reprennent du terrain. Dans ma tête, je commence à faiblir : « j’ai été trop présomptueux, je n’ai aucune expérience de cette distance et je tire à fond, quel abruti ». En fait, je suis tellement au-dessus de mes objectifs de temps que j’en viens à me résigner : même si je lève le pied, je devrais quand-même arriver dans les 200 premiers ! Alors on ne lâche pas, le but c’est de finir, on verra bien.

 

La Mongie, centre de réanimation ?

A l’arrivée à la Mongie, je crève de chaud. Un organisateur demande à contrôler une partie de mon équipement de sécurité : couverture de survie et veste imperméable. Tout y est, je file vers le ravitaillement. Et là, devant moi c’est l’hospice derrière le champ de bataille : 2 coureurs sont sur des civières, un autre ne tient pas debout, un autre est en doudoune, un autre encore parle bizarrement. Ok, j’ai souffert mais quand je vois ces types, je réalise que c’est dur pour tout le monde. Je fais une longue pause (7 minutes), histoire de bien me rafraîchir et de bien m’hydrater (coca et eau). Je ressors du ravitaillement en grelottant. Ça c’était un rafraîchissement ! Le gros coup de chaud et la fatigue ont laissé des traces, je suis encore un peu attaqué, mais visiblement un peu moins que ceux qui sont restés dans le ravitaillement. Je pointe 25ème, ce n’est pas le moment de faiblir. Mes parents sont là, avec 1L de boisson toute fraîche ! Géniaux les assistants de course ! Et cerise sur le gâteau, je repars avec mon frère qui m’accompagnera jusqu’au col de Bastanet.

 

La chaleur est toujours forte et une fois arrivé vers les cabanes de Barassé, la montée vers le lac de Gréziolles est terrible. Mon frangin me motive bien mais je suis atone, je me répète en boucle que dans la troupe y’a pas de jambes de bois, que la meilleure façon de marcher c’est de mettre un pied devant l’autre et de recommencer. Trois coureurs me dépassent, je n’ai plus la force de suivre. C’est moralement difficile, je m’accroche tant bien que mal.

 

Nuages en vue ! 

Soudain, à l’approche du lac de Gréziolles, des nuages cachent le soleil qui ne reviendra quasiment plus. En quelques minutes, je me sens ragaillardi ! Je croise assis sur le chemin un des coureurs qui m’avait doublé. Il se repose un peu mais il va bien. Je l’abandonne alors et je sens que les jambes on repris des forces. Avec mon frangin on se met alors à courir le long du lac de Gréziolles, puis à monter jusqu’au refuge de Campana à donf. Que c’est bon ! Au ravitaillement, quelques coureurs font une pause avant d’attaquer la dernière portion en altitude. Je pointe 22ème et je suis en pleine forme ! Incroyable ! 1 minute 30 de pause et deux verres d’eau plus tard, en voiture Simone !

 

La montée jusqu’au col de Bastanet se fait au pas de course, à 10’30 au km, ce qui permet de reprendre trois coureurs juste avant le col. Mon frère fait demi-tour au col, rendez-vous à l’arrivée ! Les premiers mètres de descente qui suivent le col permettent de tester les jambes et d’évaluer la fraîcheur des trois coureurs qui me suivent. De mon côté, tout va bien, la tendinite a disparu (au moins dans la tête), les muscles sont souples. A mon avis, la chaleur de l’après-midi ma permis de garder du jus dans les jambes. J’attaque à fond le raidillon qui suit le col histoire de voir. Au bout de 300m, je me retourne : les gars sont encore dans le 1er tiers du raidillon ! Mon sang ne fait qu’un tour : si les trois gars qui me suivent ont les pattes grillées, alors c'est peut-être pareil devant ! Char-gez !

 

Je pars à fond, les jambes sont bien là. Au bout de 10 minutes, je dépasse trois gars en train de marcher. Dingue ! A oui mais non, on ne court pas la même distance, ils sont sur le 160km ! A voir la tête de certains, je me demande s’ils vont finir la course, les pauvres. Je poursuis sur ma lancée, je double des poignées d’ultra-trailers mais je ne vois aucun coureur du 80km. Où sont-ils ?

 

Merlans, pas le temps !

J’accélère encore jusqu’à l’arrivée au dernier ravitaillement de Merlans. Je ne m’arrête pas, je bois quelques gorgées d’eau au tuyau d’arrosage et je repars aussitôt… en 17ème position ! En fait, j’ai dû doubler des coureurs depuis les lacs de Bastan sans m’en apercevoir. J’ai dû les prendre pour des coureurs du 160km. Les jambes sont toujours au top, mais les ongles commencent à couiner. J’imagine que je vais en perdre deux ou trois, rien de méchant mais c’est un peu douloureux quand-même. Il y a toujours un peu de casse dans les fêtes !

 

J’attaque la dernière côte de la journée, la montée au col du Portet. Au moment de partir, je vois un concurrent sortir du ravitaillement. Il s’agit d’un coureur du 80km. Action ! J’appuie sur le champignon, je donne tout et je ne regarde plus derrière. Arrivé au col, je me retourne, le coureur en est à peu près à la moitié de la côte. Cela me laisse une avance confortable ! Je pars à fond dans la descente et sur la première section très raide, je croise des coureurs du 160km qui descendent en marche arrière. J’ai mal pour eux ! Je n’ai pas de bâtons et la verticalité des pentes commence à faire chauffer les cuisses. Soudain, j’aperçois plus bas un coureur qui, vu son rythme, doit être sur le 80km. On oublie les cuisses qui chauffent, on accélère ! Les grosses pentes sont passées, je peux allonger davantage la foulée.

 

Au 78ème kilomètre, ma montre rend l’âme, après 12h45 de bons et loyaux services. J’ai envie de tout donner mais je crains d’exploser car 5-6km en descente, c’est long, surtout quand on n’a pas une idée précise de ce qui reste. J’accélère « à fond prudemment », jusqu’à apercevoir loin devant un coureur. Je me retourne, personne. C’est le moment de gagner des places ! Turbo Boost ! J’approche assez rapidement du coureur qui ne semble pas trop pouvoir accélérer. Je continue sur ma lancée, je ne le vois bientôt plus derrière moi.

 

Quelque minutes plus tard, Oh ! Un autre coureur ! Turbo Boost ! Même scénario ! Je commence à entendre le commentateur de la course, plus que quelques lacets avant les deux derniers kilomètres de plat. Il ne faut pas lâcher… Oh ! Encore un coureur !!! Turbo Boost ! Je le double dans le dernier lacet, à 30m de la route ! Je court comme un fugitif sans me retourner. Pourvu qu’il n’accélère pas, je n’ai quasiment plus de réserve sous la pédale ! Je me retourne sur la dernière ligne droite avant l’entrée dans le village : personne derrière. Devant : personne non plus.

 

The end

Alors je relâche un peu, l’arrivée est à 500m, je me demande si je n’ai pas halluciné, il doit y avoir un loup quelque part. Je franchis la ligne bien éclaté mais encore dubitatif. On scanne ma puce : 14ème, 13h33 ! Ce n’est pas un rêve, c’est bien réel. Ouah ! Les 2 coureurs que j’ai doublé en fin de course arrivent, nous nous félicitons, nous sommes heureux d’être arrivés ! Direction ensuite le ravitaillement, un bon gros verre d’eau, assis sur une chaise, à l’ombre de la tonnelle, fourbu, heureux. Comme la vie peut-être douce !

 

Ah que merci !

Un grand merci aux orchestrateurs de cette course, d’une amabilité aussi grandiose que leur professionnalisme. Et puis un grand merci à mon équipe de choc, mon frère et mes parents, qui ont découvert l’univers du trail à cette occasion et qui se sont investis sans limite pour me soutenir ! Et bien-sûr un immense merci à ma femme et à nos bouts de choux qui subissent les hauts et les bas d’un amateur passionné. Papa bobo zenou ? :-)

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